dimanche 17 octobre 2021

Réflexions de Jean Martin : ENGAGEMENTS ...

 L'époque nous fait vivre, ou au moins constater, des engagements forts qui interpellent. Je veux parler ici de ceux que déclenchent le dérèglement climatique et l'urgence d'agir à cet égard - à quelques jours de l'ouverture de la COP 26 de Glasgow.

 Je n'oublie en rien qu'on a vu dans le passé de tels engagements remarquables de milliers de personnes pour d’autres causes, souvent au péril de leur vie: récemment à l'époque sombre du nazisme, lors des luttes pour les indépendances, dans la défense de droits humains etc. Avec des figures absolument majeures comme Gandhi et Nelson Mandela... il y en a eu beaucoup .

 Plus modestement, je pense donc à celles et ceux, jeunes, moins jeunes et beaucoup moins jeunes, qui agissent pour sensibiliser à l'urgence climatique (et qui n'ont pas perdu leur motivation malgré le funeste refus de la loi CO2 il y a peu). Vieux médecin à la retraite, j'ai établi des liens de plus en plus étroits avec des professionnel-le-s de santé engagé-e-s au sein des "Doctors for XR/Extinction Rébellion".  Des collègues femmes et hommes, dont une bonne demi-douzaine de professeur-e-s de la faculté de Lausanne (même sans activité annexe, être prof de médecine est généralement plutôt astreignant) qui ont le courage et trouvent l'énergie et le temps de défiler, ou parfois de se coucher sur le bitume brûlant, aux quatre coins du pays ; de prendre le risque de passer des nuits au poste et de se faire mal voir des "passants honnêtes" dont parlait Brassens dans "Bancs publics".

 Parmi les jeunes, j'ai eu de contacts avec plusieurs ayant décidé, pour une période au moins, de consacrer tout leur temps à la cause climato-écologique (ne pas oublier la chute dramatique de la biodiversité), renonçant donc à gagner leur vie - ce que les passants honnêtes trouveront peut-être guère responsable. Je trouve hautement respectable, plus que cela j'admire.

Quelques éléments y relatifs dans la presse récente :  "Ces militants ne sont pas des délinquants, leur but est d'attirer l'attention sur une situation gravissime. Ce sont des lanceurs d'alerte qu'il faudrait remercier" (l'avocat de Antoine Thalmann, récemment condamné à Lausanne  - 24 heures du 25 septembre).

 "Il y a un peu de peur, bien sûr. Mais nous devons sortir de notre zone de confort ``- le mari d'un jeune couple qui a participé aux manifestations de XR à Zurich la semaine du 4 octobre. L'homme a pris des vacances pour deux semaines, l'épouse indépendante a libéré son emploi du temps et ils se sont organisés pour la garde de leurs jeunes enfants (24 heures du 4 octobre).

Et puis, parmi les beaucoup moins jeunes évoqués plus haut, il y a l'incroyable couple lausannois de Isabelle et Pascal Veillon, 76 et 83 ans. Ils étaient à Zurich. Pascal a passé une nuit en cellule et Isabelle deux...  Ceci assorti de dizaines de jours-amende (Le Matin-Dimanche du 10 octobre). " Leur engagement pour la sauvegarde de la création, en faveur d'un mode de vie qui ne blesse pas l'environnement, trouve sa source dans leur foi. Et aussi dans le sentiment que leur génération est en grande partie responsable du dérèglement", dit l'article.

Enfin, l'écho personnel d'une "Grand-parent pour le climat" qui elle aussi est allée sur les bords de la Limmat, depuis le Valais: "J'étais bien à la manif de Zurich et ai été arrêtée avec le reste du groupe. Impressionnant, quatre policiers par personne. Celui qui est venu me chercher dans le fourgon pour m'amener en prison m'a dit en bon français "C'est très bien ce que vous faites. Continuez."

 Faut-il rire ou pleurer ? Mais si même les policiers se mettent (en paroles pour commencer) à donner dans la désobéissance civile, peut-être ce pays superstable, qui déteste être dérangé dans ses certitudes autosatisfaites, est-il en train de changer ?

 

 Jean Martin